La mise en place d’une cadastration universelle à vocation fiscale concernant l’ensemble du territoire français a été lancée sous le Premier Empire et achevée sous la Restauration. Elle avait été précédée dans certaines communes test par les plans par masses de cultures réalisés sous le règne de Louis XVI. Cette première mission cadastrale témoigne d’une occupation du sol directement issue de l’Ancien Régime. Elle plaque toutefois une nouvelle réalité juridique (le droit foncier est désormais fondé sur le principe de la propriété individuelle de la parcelle) sur un terroir jusque-là divisé en fiefs, cens et tenures. Cette source cartographique bien connue des archéologues présente de nombreux intérêts : fiabilité technique et précision des représentations (cartes réalisées par des géomètres) ; sincérité des descriptions (document normatif à vocation fiscale) ; unité d’assiette géographique (la commune : tout le territoire du pays est couvert sans aucun oubli) ; rapidité d’exécution (la mission cadastrale dure environ un an pour une commune). Les transformations récentes du paysage (grands remembrements agraires au milieu du XXe s. dus à la généralisation du tracteur, plans d’aménagement du territoire à partir des années 1960) ont provoqué la disparition de nombreuses composantes du paysage ancien. On tentera de montrer qu’il est possible d’effectuer une analyse régressive des plans parcellaires anciens afin de tenter de dégager les tendances fortes ayant présidé à la formation du terroir sur le temps très long. Le résultat final du traitement graphique sera contraint par de nombreuses limites méthodologiques mais il constituera un document d’évaluation qui devra être abondé par les données de l’archéologie de terrain. À travers plusieurs expériences menées depuis 10 ans, on montrera que la fiabilité des résultats varie fortement en fonction des particularités du terroir, de l’existence de données issues de fouilles sur de très vastes surfaces et du choix de l’aire d’étude qui est d’autant plus pertinente qu’elle s’étend sur plusieurs communes. On illustrera la présentation par des exemples concernant les terroirs de Méaulte (Somme) et la Chaise-Dieu (Haute-Loire), et par les recherches en cours sur la moyenne vallée de l’Oise entre Noyon et Compiègne dans le cadre des interventions archéologiques sur le tracé du futur canal Seine-Nord.