Qu’il s’agisse de la pandémie COVID-19, du dérèglement climatique, ou de la perte globale de biodiversité, une part importante des plus grands défis sociétaux actuels impliquent, d’un côté, une analyse et une compréhension du monde empirique, et de l’autre, une analyse de la production de cette connaissance empirique, à savoir ce que les sciences et la médecine ont produit. Parmi les disciplines les plus vielles de faire cette étude de la science à ce niveau « méta » se trouve la philosophie des sciences. Comment les disciplines empiriques s’avèrent-elles des générateurs de la connaissance aussi fiables au fil des siècles ? Dans cet exposé, je présenterai quelques travaux récents de notre groupe de recherche sur les questions de biodiversité, qui illustrent notre approche à ce type de problème. Pourquoi a-t-il été si difficile de réagir à une perte de biodiversité largement reconnue ? Notre hypothèse est que nous avons négligé la profondeur du désaccord conceptuel qui existe entre les domaines travaillant autour du problème. Ce qu’un groupe de taxonomistes entend par « biodiversité » n’est pas forcément ce à quoi on fait appel dans une discussion de l’importance de la biodiversité pour la santé humaine. Mais ce désaccord, à son tour, est un phénomène empirique : on peut l’étudier en cartographiant la littérature scientifique par biais d’analyses numériques.